Triste rituel
La cloche sonne mais ne réveille pas les morts. Son tintement oscille sur des vagues de vent, froides et humides, qui s'évadent de cet endroit troublé. La peine se dissimule sous des manteaux de nuit abritant des peaux blanches et peureuses. Des têtes penchées regardent des chaussures malheureuses au cuir ciré, fouettées par une boue malveillante. Autour de tout ce monde déguisé en noir, je ne sens encore plus près de toi, mon ami disparu.
Ici, c'est l'automne toute l'année. Je ne pleure pas encore, je m'efforce de sourire. J'ai vu ton père tout à l'heure, il retenait ta mère défigurée par les remords. Tu vois, on devrait toujours se parler...
Allongé dans ton armoire étroite, tu ne peux voir tous ces gens tristes regrettant ton départ. Je suis sûr que tu n'en connais pas la moitié ! Le curé a parlé à ta place, je te connais bien, t'aurais pas dit toutes ces conneries !
Pendant que la terre aspire le cercueil impuissant qui recouvre l'origine de la vie, les esprits se peuplent de départs. Puis, le cortège s'évapore dans les sentiers du labyrinthe des morts sous les nuages en deuil où une pluie clôture ce pénible rituel.
A nouveau séparé, je reste là, debout à contempler le vide grandissant. Comme tu me manques mon ami !
Texte 1997